"L'idée est de ne pas permettre de faire n'importe quoi"

Après Mélin, Saint-Remy-Geest est le second village du Brabant wallon à être labellisé « Plus beau village de Wallonie ». De quoi permettre une préservation urbanistique, paysagère et architecturale de l’entité. Un label qui entraine également quelques contraintes sur le plan règlementaire pour les futurs demandeurs.

Texte : Xavier Attout - Photo : Rita Photographie

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Découvert sous le soleil, il ressemble à un paisible petit village du sud de la France. Deux rues principales, une église, un espace pavé qui fait office de place de village, une petite école, aucun commerce et, surtout, des dizaines de maisons assemblées à la pierre de Gobertange. Se plonger dans les rues de Saint-Remy-Geest, un petit village situé à deux pas de Jodoigne, c’est partir à la découverte d’un monde où le temps semble s’être figé. Des caractéristiques particulières qui en font depuis le mois de mai l’un des trente-et-un « Plus beaux villages de Wallonie ». Le second du Brabant wallon, après Mélin, le village voisin construit dans le même moule. Le « pays blanc » se voit ainsi récompensé de la beauté de son bâti. « C’est une belle satisfaction, explique Frédéric Jacoby, président de Vivre à Saint-Remy, l’association qui a déposé le dossier de candidature, en concertation avec les autorités communales. L’objectif de cette candidature était en quelque sorte de se protéger contre une évolution du village qui pourrait nuire à son avenir. Nous sommes maintenant soulagés que la préservation urbanistique, paysagère et architecturale soit officiellement reconnue. » Installé sur le flanc de la colline, Saint-Remy- Geest compte précisément 222 bâtisses et 524 habitants. « Le recensement a été réalisé l’an dernier lors de la rédaction du dossier de candidature que nous avons rentré. Il est donc à jour. » Dans le village, on remarque assez rapidement que la majorité des maisons ont été construites avant 1750.

La couleur beige, caractéristique singulière des pierres de Gobertange, tapisse le moindre recoin de l’entité. Et si les pierres ont parfois été recouvertes d’un enduit, toutes les maisons ont aujourd’hui réparé les erreurs du passé.

 

L’objectif était de se protéger contre une évolution du village qui pourrait nuire à son avenir. Nous sommes maintenant soulagés que la préservation urbanistique, paysagère et architecturale soit officiellement reconnue.

Frédéric Jacoby, président de Vivre à Saint-Remy

Une culture urbanistique bien définie

Quand on se balade dans le village, il ne faut pas marcher bien longtemps pour découvrir l’édifice le plus emblématique, à savoir l’église Saint-Remy, qui domine le village. Elle a été entièrement bâtie au XVIIIe siècle, empilant les pierres de Gobertange. Autre élément singulier : le moulin de Genville, l’unique bâtiment classé. « On perçoit clairement la grande linéarité du bâti de ce village, explique Frédéric Jacoby, qui a construit sa maison il y a 15 ans sans être au courant de la culture urbanistique des lieux, ce qu’il souhaite désormais inculquer aux nouveaux habitants. Il faut la préserver car c’est très rare. Toutes les maisons doivent suivre un cadre bien précis. » Comme cette maison en cours de construction découverte lors de notre balade dans le village. On y aperçoit clairement que les pierres de façade en cours de maçonnerie sont de Gobertange. Ou encore cette extension qui s’est inscrite dans la lignée du parement local. « Il serait en effet très inopportun qu’un nouvel habitant arrive et construise une bâtisse qui irait à contre-courant du bâti actuel. Ce ne serait pas la meilleure manière de se faire bien voir et de recevoir un bon accueil (sourire). » Car ceux qui construisent leur maison doivent respecter quelques règles, le Guide communal d’urbanisme jodoignois étant le plus élevé. Il n’y a pas de règlement spécifique pour Saint-Remy- Geest. « Cette labellisation nous a toutefois permis de créer un groupement local qui étudiera les demandes de permis d’urbanisme qui concernent Saint-Remy-Geest. Elles sont également envoyées à l’asbl des Plus Beaux Villages de Wallonie. Le but n’est pas de faire office de second service d’urbanisme, à côté de celui de Jodoigne, ni de se substituer à ses prérogatives mais bien de permettre aux habitants de préciser leurs sensibilités sur un projet et d’être au courant. » Village voisin de Mélin, Saint-Remy Geest entend profiter de son expérience pour favoriser les événements communs, de manière à renforcer la mise en lumière des deux villages. « Ils sont tous les deux très proches. Même si, par rapport à Mélin, notre village a une structure plus concentrée du bâti. » Les bâtisses sont en effet principalement disposées le long de deux rues parallèles, coupées par une troisième voie transversale qui ouvre la vue vers un magnifique fond de vallée. Parmi les découvertes à effectuer, on peut signaler un « Porche-colombier » qui marque l’entrée d’une ferme du XVIIIe siècle dans la rue de la Vanne, une ancienne grange en colombage, d’anciennes fermes en L ou tri cellulaire, ou encore « La Cense Bivort » et son jardin. Il s’agit d’une ferme en U du XVIIIe siècle qui est posée en contrebas de l’église.

LA WALLONIE SUR SON 31

Le club ne cesse de s’agrandir. On recense désormais trente-et-un villages labellisés « Plus Beaux Villages de Wallonie ». « Ils sont le reflet des richesses patrimoniales, paysagères et touristiques de notre Wallonie rurale, lance Mark Rossignol, coordinateur de l’asbl « Les Plus Beaux Villages de Wallonie ». Chacun possède sa propre identité, son histoire, son ambiance, sa chaleur, son charme qui le rend unique pour celui qui y habite autant que pour celui qui le visite. » Un ou deux villages s’ajoutent chaque année à la liste. Alors qu’un « bilan de santé » effectué tous les six ans pour analyser l’évolution architecturale, paysagère et urbanistique permet de prolonger ou de retirer la labellisation. « Nous avons déjà écumé la Wallonie de long en large, poursuit Mark Rossignol. Et je pense qu’il est envisageable de se dire qu’un maximum de 35 villages pourront être labellisés. Il n’y en aura donc plus beaucoup. »

Les candidatures sont déposées par des associations ou des communes. Elles doivent respecter les critères d’éligibilité de la Charte Qualité du Réseau. L’objectif est le plus souvent le même, à savoir le maintien du cadre de vie et du cadre bâti. « Il y a aussi la volonté de recréer une dynamique autour d’un projet mobilisateur. La qualité du patrimoine est obligatoire tout comme la dynamique touristique potentielle. »

La candidature de Saint-Remy-Geest a clairement séduit le jury. « Que ce soit le moulin de Genville, la vallée de Gobertange, la variété des espaces et du bâti, la variété d’implantations (ferme en U), les ruelles pavées, la qualité des matériaux ou encore la dynamique associative, tous ces éléments ont été particulièrement remarqués.”