« La densification des villages un vrai modèle d’avenir »

« La densification des villages un vrai modèle d’avenir »
Bimby, Yimby, Wimby. Les acronymes se succèdent mais les objectifs restent. L’avenir de nos quartiers de quatre façades s’écrit toujours plus en pointillés, écartelé entre la couteuse rénovation de villas obsolètes et la densification douce des grands jardins. Des modèles à réinventer en Brabant wallon. Et qui pourraient bien s’inspirer du succès de certaines opérations françaises.
Texte : Xavier Attout - Photo : Villes Vivantes
Bimby, Yimby, Wimby. Les acronymes se succèdent mais les objectifs restent. L’avenir de nos quartiers de quatre façades s’écrit toujours plus en pointillés, écartelé entre la couteuse rénovation de villas obsolètes et la densification douce des grands jardins. Des modèles à réinventer en Brabant wallon. Et qui pourraient bien s’inspirer du succès de certaines opérations françaises.
Texte : Xavier Attout - Photo : Villes Vivantes
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Depuis Bordeaux, il fait rayonner sa vision de l’urbanisme dans toute la France. Et ce via Villes Vivantes, une agence d’urbanisme qui accompagne depuis plus de dix ans les pouvoirs publics et les particuliers dans leur démarche de densification douce du territoire. L’objectif étant de « vivifier les villages, faire grandir nos villes et vibrer nos métropoles. » Une trajectoire inspirante pour le Brabant wallon. Interview avec David Miet, le patron et fondateur de Villes Vivantes.
Après plus de quinze ans de travail sur le sujet, quel bilan tirez-vous de l’implémentation du Bimby (Build in my backyard) en France et ailleurs ?
DAVID MIET. Je ne sais pas si cela a été plus facile que je ne le pensais. Entre 2008 et 2012, ma surprise était de découvrir l’enthousiasme des particuliers à adhérer à ce principe de division de parcelle. La problématique de l’acceptation par le voisinage se posait mais n’était pas insurmontable. Par contre, la vraie difficulté se situait dans les rangs des professionnels. Ils ont toujours construit à grande échelle, des lotissements entiers, et travailler à une échelle plus réduite s’avérait particulièrement compliqué. Les changements sont toujours plus lents dans le monde professionnel qu’auprès de particuliers.
Et aujourd’hui, où en est-on ?
La situation s’est quelque peu inversée. Après dix ans d’évangélisation, l’idée de la densification douce est acceptée et comprise tant par les particuliers que les professionnels. Cela a évolué dans le bon sens. Par contre, l’acceptabilité sociale de cette densification par les voisins est devenue beaucoup plus difficile. Le phénomène Nimby s’est renforcé en même temps que la crise du logement. La hausse des prix dans les grandes villes a éloigné du marché une série de gens qui disposaient de moins de moyens, les renvoyant dans des villes périurbaines. Ces nouveaux habitants, qui estiment avoir payé leur logement assez cher, ne souhaitent pas voir leur environnement évoluer et s’opposent à toute densification. Les maires écologistes de Bordeaux et de Lyon ont par exemple été élus en avançant dans leur programme qu’ils allaient ralentir tous les projets de construction. Le Nimby et l’écologie se rejoignent pour eux. Or, ce stop au béton entraine bien d’autres problèmes comme l’accessibilité au logement.
En Brabant wallon, les pouvoirs publics sont relativement réticents à l’idée d’accepter la division de parcelles, par crainte de devoir gérer les problèmes connexes qui pourraient se créer (mobilité, équipements supplémentaires). Comment parvenez-vous à les convaincre de votre côté ?
Ces dernières années, nous avons surtout travaillé à rendre le Bimby pilotable par les communes. C’est-àdire que les opérations de revitalisation urbaine qui comptent une centaine de micro-projets possèdent un début, un milieu et une fin. La vraie crainte d’un pouvoir public est de ne pas avoir la maitrise de la densification de son territoire. Il l’a dans le cadre de l’aménagement d’un lotissement. Cela ne lui semble pas être le cas dans le cadre d’opérations plus ponctuelles. Nous veillons donc à rendre cette densification pilotable.
La vraie crainte d’un pouvoir public est de ne pas avoir la maitrise de la densification de son territoire. David Miet, urbaniste
Même si la densification du territoire et la fin de l’étalement urbain sont dorénavant de tous les discours et semblent être bien ancrés dans les têtes, les rêves de maison 4 façades sont toujours plus présents. Comment expliquer cet attachement ?
Je me demande même si ces rêves ne sont pas renforcés ces derniers mois. Le covid a suscité un besoin d’avoir davantage d’espaces extérieurs. La maison est devenu un produit particulièrement recherché. Elle permet d’avoir un espace privatif qui est protégé du monde extérieur. Et cela rassure. Ce schéma va toutefois devoir se confronter à celui des besoins en matière de rénovation. Il est également loin d’être le plus intéressant en matière d’urbanisme et d’aménagement du territoire.
Quel avenir voyez-vous pour tous ces villages entourés de quatre façades ?
C’est un fait, on ne va pas tout raser, il faut donc trouver des solutions. Le point de convergence entre le frein à l’étalement urbain et la densification pourrait être à trouver dans la densification villageoise ou de communes de taille moynne. La dynamique actuelle de ces villages ou communes ne leur permet pas d’être suffisamment attractifs. Or, en augmentant la population, cela permet d’avoir davantage de boulangeries, de commerces, d’infrastructures sportives. Les services sont davantage rentables. Procéder de cette manière serait beaucoup plus intelligent. La densification sous forme villageoise est une voie intéressante pour contrer l’étalement urbain. Il y a 9 millions de jardins en France qui pourraient être densifiés. C’est énorme.
En Brabant wallon, les besoins de densification et de diminution de l’étalement urbain se heurtent aux retards pris dans l’aménagement de centres attractifs. Or, l’un ne va pas sans l’autre. Les pouvoirs publics ne négligent-ils pas trop la carotte par rapport au bâton ?
En effet. A New-York, le nouveau maire est pro-densification et on voit les habitants revenir après être partis pendant le covid. Il veut mettre l’accent sur la qualité de vie en ville. Il a lancé le concept de « Yes in my backyard ». Densifier le territoire sans ne rien proposer en échange est un non-sens.
Le Wimby (Welcome in my backyard) est un nouveau concept que vous avez lancé il y a peu. C’est pour donner une image positive de la densification ?
Il s’agit surtout d’un concept transitoire qui permet d’avancer sur des densifications douces de particuliers en attendant qu’une commune adopte une vision.
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