Patrimoine
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Changer d’âme, garder la même peau

Changer d’âme, garder la même peau
Chapelles, granges, moulins, écoles, gares, halls industriels… de nombreux bâtiments ont vu leur vocation changer au fil du temps. Une affectation culturelle permet à la fois de leur redonner vie tout en protégeant l’authenticité et l’intégrité d’éléments patrimoniaux remarquables.
Texte : Caroline Dunski - Photos : Sissi Vandermersch
Chapelles, granges, moulins, écoles, gares, halls industriels… de nombreux bâtiments ont vu leur vocation changer au fil du temps. Une affectation culturelle permet à la fois de leur redonner vie tout en protégeant l’authenticité et l’intégrité d’éléments patrimoniaux remarquables.
Texte : Caroline Dunski - Photos : Sissi Vandermersch
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La Région wallonne compte plus de 4200 biens classés. Un quart d’entre eux sont privés. Le classement constitue une mesure de protection destinée à assurer la conservation, l’entretien et, si nécessaire, la restauration des biens patrimoniaux des villes et villages de Wallonie. Le classement peut concerner l’ensemble d’un bien, comme c’est le cas de l’église Saint-Martin de Beauvechain, ou certains éléments, comme pour les façades, les toitures et la salle de spectacle du Foyer populaire qui abrite le Centre culturel du Brabant wallon, à Court-Saint-Étienne, depuis 1985. « Il s’agit de conserver au maximum les caractéristiques qui ont amené au classement, souligne Vincent Léonard, historien de l’art de l’Agence wallonne du Patrimoine (AWAP). La culture, sous toutes ses facettes, peut être une alternative intéressante pour la réaffectation de bâtiments patrimoniaux, quand celle-ci risque de les dénaturer. C’est le cas notamment des églises, des granges, de certains bâtiments industriels pour lesquels une affectation culturelle permettrait de leur redonner une nouvelle vie sans trop les transformer, ni les dénaturer de manière excessive. »
La culture, sous toutes ses facettes, peut être une alternative intéressante pour la réaffectation de bâtiments patrimoniaux, quand celle-ci risque de les dénaturer.
Vincent Léonard
Cultuel et culturel peuvent faire bon ménage
« Ce n’est pas parce qu’un bâtiment est classé comme monument qu’il doit rester figé, explique Vincent Léonard. Certaines des affectations d’origine ne sont plus possibles, du fait de l’évolution de la société. Comme la chute croissante du nombre de fidèles dans les églises et le coût d’entretien de ces édifices, que les communes ont de plus en plus de mal à supporter. Un des grands défis sera de trouver une solution pour ces lieux de culte qui représentent souvent le cœur d’un village. Un changement d’affectation est, dans ce cas, primordial pour espérer pérenniser ces biens qui ont perdu leur fonction d’origine. »
Au début des années 2000 à Jodoigne, la Ville et la fabrique d’Église de la Chapelle Notre-Dame, dite « Chapelle du Marché », classée depuis 1958, signaient une convention permettant l’utilisation des lieux pour des activités culturelles, tout en gardant à l’édifice son caractère religieux.« Le projet de réaffectation de la Chapelle Notre-Dame est un modèle de réaffectation d’un bâtiment de culte devenu insalubre par son manque d’entretien. Il a permis de concilier le cultuel et le culturel. Le chœur de l’église est toujours sacralisé, ce qui permet d’y célébrer de temps en temps des offices. Le reste de l’intérieur de la chapelle a été aménagé de manière moderne et modulable pour pouvoir transformer l’espace en salle de spectacle ou d’exposition, tout en conservant des éléments patrimoniaux intéressants. L’aspect extérieur n’a pas été modifié. Ce projet a permis, d’une part, de pérenniser un bâtiment patrimonial très intéressant et, d’autre part, de redonner un dynamisme culturel dans le centre de Jodoigne. »
De l’agriculture à la culture
Pour certains types de biens, comme les granges de ferme, l’affectation culturelle convient particulièrement bien. « Leurs grands volumes permettent d’accueillir du public et leur transformation est moins importante que s’il s’agit de faire du logement, par exemple », souligne Bernadette Streel, historienne de l’art attachée à l’inventaire du patrimoine de l’Awap. De multiples exemples existent en Brabant wallon, comme la Ferme du Biéreau, classée en 1988 et devenue « Maison de toutes les musiques » en 2007. Sa grange accueille des concerts tandis que le corps de logis abrite des studios d’enregistrement.
À Thorembais-les-Béguines, les façades et toitures de la Petite Cense sont classées depuis 1988. Les artistes Karim Baggili et Karoline de la Serna, l’ont acquise début 2020 avec le projet d’en faire un lieu de projet et de création alliant humain, art, culture et bien-être, tout en faisant participer les habitants du village, sur le modèle des Fêtes de la Saint-Martin à Tourinnes. « La grange, déjà rénovée par les anciens propriétaires et servant de salle de mariage, fera l’objet de moins de transformations, souligne le chanteur. Toutefois, elle nécessite d’être équipée techniquement de loges, d’une scène, de lumière, pour pouvoir programmer des concerts et des spectacles dans des conditions professionnelles. La procédure pour l’obtention du permis est en cours. Les réunions pour mettre tout en musique constituent un travail important. Il s’agit de protéger le patrimoine et de faire vivre le lieu, ce qui nécessite pour les instances représentant le patrimoine de lâcher un peu de lest. »
À Rebecq, certaines parties de l’Hospice communal sont classées depuis 1977. Dans le cadre de son Programme communal de développement rural (PCDR), la Commune veut transformer la grange en « Maison de l’entité » afin de valoriser ce patrimoine classé et de créer un lieu de vie polyvalent à destination des habitants et des nombreuses associations actives sur le territoire communal.
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